Tonnerre d'applaudissements pour Boris Prager, Prix Humour 2023 pour Tuning !
Si nous devions résumer Tuning en quelques mots, nous dirions que ce sont des « blagues bien debout, qui claquent ; de comédien·nes qui se lâchent et s’amusent visiblement autant que le public, de situations improbables et de personnages à chaussettes dans les clapettes ». En résumé, « plein les yeux, plein les oreilles ! Lumières, sons, musique, paillettes et frigobox à gogo ». Boris Prager est l'heureux lauréat du Prix SACD Humour 2023 pour son hilarante et touchante pièce Tuning, « une comédie à la sauce bien belge ». À lire et à relire sans modération, l'interview de l'auteur et l'éloge du Comité belge.
L'éloge du Comité belge
Tuning, c’est typiquement le spectacle qui est volontairement «out-of-tune», mais qui sonne bien et détonne juste ! Plein les yeux, plein les oreilles ! Lumières, sons, musique, paillettes et frigobox à gogo.
Désertification des plateaux de théâtre due aux conditions économiques précaires : l’humour, c’est souvent par excellence la concrétisation de la loi de Baumol.
À l’heure du plateau nu et du stand-up solitaire triomphant, voici de la surabondance et des personnages souvent affalés sur les chaises et la table plastique du pique-nique... Assis, oui, mais leurs mots se lèvent tout aussi bien.
Boris Prager remplit son théâtre de blagues bien debout, qui claquent ; de comédien·nes qui se lâchent et s’amusent visiblement autant que le public, de situations improbables et de personnages à chaussettes dans les clapettes.
On ne rit pas tant d’elles et eux, mais de soi-même ; car on se retrouve là dans la fascination enfantine et jubilatoire qu’on a de la caravane studio radio du DJ, des maquillages outrés, des costumes trop pétards qu’on ne mettrait jamais, mais qu’on aimerait bien quand même parfois enfiler.
Là où la langue française est riche de ses accents, souvent elle ne l’admet pas... Ici, dans Tuning, la langue belge, c’est Crésus ! Mais un Crésus généreux qui donne à tout va, volubile et prodigieusement prodigue.
David Chazam, membre du Comité belge de la SACD
Boris Prager, wallon et multiple
Comédien, acteur, auteur, directeur artistique de la Ligue d’impro et rappeur, il est récompensé par la SACD pour sa première pièce de théâtre, la comédie “Tuning”, créée au Théâtre de la Toison d’Or (TTO) en 2022.
“Je ne m’attendais pas du tout à recevoir ce prix de la SACD tout comme je ne m’attendais pas à, un jour, écrire une pièce de théâtre pour le TTO”, affirme, en toute sincérité, Boris Prager. “Depuis sa création, en 2022, Tuning connaît un succès grandissant auprès du public. C’est très agréable de voir que ces blagues que j’ai écrites tout seul dans ma chambre font rire une salle.”
C’est par le biais d’un ami, qui travaille alors sur la série télévisée Baraki, que Boris Prager est mis en contact avec la directrice artistique du TTO, Nathalie Uffner. Haut-lieu de la comédie à Bruxelles, le TTO cherche un auteur pour écrire une pièce autour de la figure des barakis, qui se déroulerait dans un terrain vague et en chansons. “On ne se connaissait pas du tout avec Nathalie Uffner. On a eu un premier rendez-vous ensemble, on a discuté et cela m’a donné tout de suite envie de me lancer dans ce projet, se souvient Boris Prager, car le TTO me donnait l’opportunité de faire quelque chose que je n’avais encore jamais fait et qui m’excitait beaucoup”.
© Fahd Zidouh
Une comédie “à la sauce bien belge”
Comédien, acteur et directeur artistique de la Ligue d’impro, il chamboule un peu le modus operandi habituel, en proposant à l’équipe de comédiens (Marie-Hélène Remacle, Ingrid Heiderscheidt, Aurelio Mergola, Julie Lenain et Pierre Lafleur) et au metteur en scène Emmanuel Dell’Erba de travailler par allers-retours au plateau. “D’abord, pendant trois jours, on a réalisé des improvisations, des présentations de personnages, etc. pour définir des archétypes, explique-t-il. Puis, chez moi, j’ai écrit. Je suis revenu au TTO avec quelques 35 pages et on a commencé à jouer les scènes que j’avais imaginées. Au fur et à mesure, les demandes et besoins se sont précisés, toujours en concertation avec les comédiens, le metteur en scène et Nathalie Uffner. Je me suis vraiment amusé : j’ai pris le schéma actentiel d’une comédie dramatique familiale à la française, mais que j’ai écrite à la sauce bien belge”.
L’histoire ? À l’emplacement 67 du camping de la Grosse Tour de Bourlin-en-Greux, la grand-mère Marlène, sa fille Jo et les jumeaux de cette dernière, Pipo et Esmeralda, animent la station radio locale, Tuning FM. Débarque un jour un dénicheur de talents, Freddy Starlight, qui accepte d’auditionner Esmeralda, à qui il fait miroiter une carrière dans la chanson. Mais ce producteur est-il bien celui qu’il prétend être ? …
La première version finale de Tuning compte... 140 pages. Nathalie Uffner suggère à Boris Prager de ramener le tout à 90. “J’ai dû ramasser, aller à l’efficace. Et c’est grâce au travail avec toute l’équipe du TTO que j’ai pu atteindre cette efficacité”, se félicite-t-il.
Ni lourd ni blessant
Écrire une comédie sur l’univers baraki est un défi digne d’un équilibriste : il faut susciter le rire, sans être lourd ni blessant. “C’était ma peur, confie le jeune auteur. Je ne voulais pas me moquer d’une catégorie de personnes, d’une classe sociale ou d’une géolocalisation particulière. Je savais que le fil serait très tendu parce que la commande était d’écrire une comédie dans laquelle, je cite, ‘ça va rire à toutes les répliques’. Le risque était là, mais j’ai assez de racines populaires et d’expériences en différents lieux emblématiques de la Wallonie pour insuffler dans mon texte suffisamment d’amour et faire comprendre qu’il n’y a pas d’intention de se moquer”.
Né le 1er février 1990 à Montigny-sur-Sambre (Charleroi), Boris Prager a grandi dans la province de Namur (entre Maredsous, Ciney et Namur), avant d’étudier le théâtre au Conservatoire de Liège. “Je suis longtemps resté à Liège, puis j’ai été à Bruxelles et, maintenant, depuis peu, je suis à Ottignies, complète-t-il. Il y a donc toujours eu beaucoup de wallons et de patois différents dans mon entourage proche. Il y avait un vrai mélange d’humours, d’univers et de classes sociales”.
Pour ne pas tomber dans le piège du cliché, “je n’ai pas voulu utiliser un code de jeu qui soit trop réaliste, relève-t-il encore, parce que je voulais que le public sente que ces personnages sont des clowns, des farces”. Et de préciser : “J’ai été formé à Liège au jeu farcesque, avec du comique de situation, des répliques courtes, qui fusent et s’enchaînent. Je savais qu’en allant vers cela, j’avais une chance que le fil ne soit pas sur la moquerie, mais bien sur le comique de situation clownesque”.
Une recette qui a montré son succès puisque le TTO a reprogrammé Tuning cette saison pendant un mois !
© Fahd Zidouh
Plusieurs projets sur le feu
Et pour la suite ? Alors qu’on le verra dès ce 21 avril dans la saison 2 de la série Trentenaires sur Tipik, Boris Prager est également rappeur au sein du collectif Basement BXL. “En tant que comédien, il est important de s’intéresser à beaucoup de choses : plus on a de cordes à son arc, plus cela va nous aider à rapprocher ou nous éloigner de nous-même”, défend-il. Par ailleurs, “j’ai toujours été partisan de lancer un maximun de lignes dans toutes les mares, en me disant qu’à un moment donné, ça va mordre. Aujourd’hui, un artiste doit être pro-actif. Et donc, j’ai beaucoup de projets sur le feu en même temps. Heureusement, pour le moment, je n’ai pas d’incendie et rien ne déborde”, conclut-il en riant.
Propos recueillis par Stéphanie Bocart, journaliste (La Libre Belgique)
Pour prolonger votre lecture
- La plume de Stéphanie Bocart a encore frappé : découvrir l'article paru sur Tuning dans La Libre Belgique
- Visiter la page consacrée à Tuning sur le site du Théâtre de la Toison d'or
- Faire un tour sur les pages Instagram et Facebook de Boris Prager
- Boris Prager nous parle de la création de Tuning sur le compte YouTube du TTO
- Boris Prager, directeur de la Ligue d'improvisation belge professionnelle
- Boris Prager, comédien de la série Trentenaires. Article d'Aurélien David à lire ( RTBF) : « Marie Diaby et Boris Prager, comédiens de "Trentenaires" : "Ce sont des gens très réalistes et qui nous ressemblent" »
- Découvrir le Palmarès des Prix SACD 2023