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Focus sur Caroline Taillet et Martin Landmeters, Prix SACD Web 2020

Mercredi 21 Avril 2021

« Iels sont des diamants bruts pour une génération qui cherche des role models dans un océan de peurs et de doutes » : quelques mots pour commencer à décrire le travail de Caroline Taillet et Martin Landmeters, à qui le Comité belge de la SACD a remis son Prix du Parcours Web en 2020. Découvrez ici une bio, un éloge par Antoine Neufmars, et un entretien avec les lauréats que nous félicitons encore chaleureusement !

 


L'auteur et l'autrice

Caroline Taillet est comédienne, autrice, metteuse en scène, réalisatrice et animatrice radio.

Au théâtre, elle joue depuis 2015 avec les compagnies Les Alices ou Les Nouveaux Disparus, et crée ses propres spectacles dans lesquels elle joue également avec le Canine Collectif : La Théorie du Y, Regis et prochainement Orgasme(s). La Théorie du Y, spectacle qu’elle a écrit et mis en scène, remporte plusieurs prix. Elle collabore avec Martin Landmeters depuis 2016 pour l’adapter sous forme de websérie (RTBF). Après avoir écrit et réalisé la saison 1 et la saison 2, ils préparent actuellement la saison 3, prévue pour 2022.

De 2016 à 2020, Caroline est également animatrice radio sur Pure.

Martin Landmeters est diplômé de l’IAD en section multimédia en 2009. L’année suivante, son projet de fin d’étude Clicked est sélectionné dans plusieurs festivals européens et reçoit un prix au festival d’animation Anima. Par la suite, il co-réalise plusieurs clips de musique dont ceux de Nicola Testa.

Il crée en 2012 le studio créatif Geometry qui produit divers types de projets multimédia comme des sites web, vidéos et autres projets graphiques.

Dès 2016, il collabore avec Caroline Taillet pour adapter la pièce de théâtre La Théorie du Y, traitant de la bisexualité, sous forme de websérie (RTBF). Il travaille actuellement sur l’écriture et le développement de la troisième saison de la websérie, prévue pour 2022.

À lire, à voir

. Le site du projet La Théorie du Y

. La fiche Bela de Caroline Taillet, et celle de Martin Landmeters 

. Le site du studio de Martin Landmeters, www.geometry.be

L'éloge d'Antoine Neufmars

Vous, vous êtes une personne qui aime les gens.
C’est formidable, c’est le futur.
La Théorie du Y, Saison 1

Le futur de Caroline et Martin est ambitieux : libérer les préjugés quant à la bi-homo-pan-sexualité en montrant les choses telles qu’elles sont ; construire une iconographie positive et éducative qui valorise ces questionnements identitaires ; délivrer des dialogues d’une justesse encore inédite sur nos écrans, emprunts d’intime et de documentations continues.

Iels ont cette bicéphalité propre au duo d’écriture, aux « sœurs et frères d’art », l’un·e partageant une gamète d’idée pour que l’autre s’en empare dans la seconde. Iels ont cette jeunesse qui permet de risquer le tout pour le tout, quitte à déplaire. Iels sont des diamants bruts pour une génération qui cherche des role models* dans un océan de peurs et de doutes.

Alors que la saison 3 de La Théorie du Y se développe et abordera le polyamour, que leur podcast Inverties se diffuse sur nos ondes, que l’œuvre théâtrale éponyme se joue toujours sur scène, nous sommes ravi·es de célébrer ce parcours transmédia effréné !

Antoine Neufmars,
présidence du Comité Belge de la SACD

*Un role model est une personne dont le comportement est ou peut être stimulant

 

Caroline Taillet et Martin Landmeters, Binôme intrépide

Ce délice de série La Théorie du Y, c’est eux. Ils ont mis la bisexualité sur la table. Et se sont lancés dans une websérie sans quasi rien y connaître. Pas froid aux yeux, mais le perfectionnisme dans la moelle.

Le pilote de La Théorie du Y a été mis en ligne sur le site de la RTBF en septembre 2016. Soutenue par le vote du public, la saison complète a été diffusée en 2017. Un format très court (11 épisodes d’environ sept minutes), un sujet inédit sur nos écrans traité avec profondeur et subtilité. Un carton. S’ensuivent une deuxième saison, une expo photos et un podcast, Inverties. Ils sont en train d’écrire, à quatre mains, la saison 3. Avec des épisodes allongés à un quart d’heure et un peu plus de budget. Elle est attendue pour 2022.

L’envie d’une troisième saison vient-elle de vous ou de la RTBF ?

Martin : La saison 2 est sortie en octobre 2019 et on a à peine eu le temps de s’en remettre que la RTBF est venue avec une proposition de troisième saison. On ne va pas s’en plaindre. Évidemment c’était alléchant, mais on n’avait pas du tout envie de faire la saison de trop.

Caroline : Le premier confinement nous a servi à réfléchir à ça : la faire ou pas ? A-t-on encore des choses à raconter avec nos personnages ? A-t-on envie, nous ? Et la réponse ne coulait pas de source. On s’est rendu compte qu’il y avait beaucoup de choses qu’on avait dites sur la bisexualité, mais aussi beaucoup qu’on n’avait pas dites et qu’on pouvait difficilement amener via notre personnage. Nous est venue l’idée d’en créer un nouveau qui sera un homme bisexuel. À partir de là on s’est sentis plus libres de repartir à zéro.


Qu’est-ce qui fait que votre binôme fonctionne bien ?

Martin : Déjà, on a chacun nos spécificités avec des parcours et des casquettes différentes. Et la moindre décision, même envoyer un mail, on la prend toujours à deux. Du coup, on avance en étant en confiance. Nos compétences se complètent. On se concerte tout le temps, mais s’il y a un dernier mot à avoir, c’est Caroline qui l’a sur le jeu, et moi sur l’esthétique.

Caroline : Et on se ressemble beaucoup dans la manière de travailler. On est très perfectionnistes tous les deux. S’il y avait eu un décalage là-dessus, on aurait eu du mal à fonctionner.

Vous vous êtes attaqués à un sujet méconnu et délicat. Comment l’avez-vous abordé ?

Caroline : La première saison était surtout inspirée de nos expériences personnelles.

Martin : Oui, la saison 1 était clairement inspirée de la pièce, inspirée de la vie de Caro. Dès la saison 2, on a pris le parti de faire des interviews avant de lancer l’écriture car on a senti la responsabilité de la voix qu’on portait. Il n’y a quasi pas de fiction LGBT en Belgique, on se sent proches de cette communauté et on ne voulait pas dire n’importe quoi.

Caroline : Et là, pour la troisième saison, on a refait beaucoup d’interviews mais d’hommes bisexuels cette fois en pointant nos questions sur des angles qu’on n’avait pas encore abordés.


Les qualités et défauts de Caroline d’après vous Martin ? Et vice versa.

Euuuuuh.

[Rires un petit peu embarrassés et sèche totale. La seule question qui les prend de court. Alors ils demandent à ce qu’on y revienne un peu plus tard histoire d’avoir le temps d’y réfléchir.]


Que feriez-vous différemment dans votre vie professionnelle ?

Martin : Moi j’ai fait des études en multimédia à l’IAD. Je fais du graphisme, des sites web, des clips. Je touche un peu à tout et j’ai des projets multiples dans de multiples disciplines. Et j’adore. Mais du coup, j’ai parfois le sentiment de ne pas être légitime dans tel ou tel métier. Avec le recul, ça m’aurait plu d’avoir une formation en réalisation et en écriture. En même temps, je suis très content de mon parcours.

Caroline : J’aimerais me faire autant confiance en tant que comédienne que pour le reste et mettre plus d’énergie et de temps là-dedans. J’ai surtout fait jouer les autres, écrit pour les autres, réalisé pour les autres et même si j’ai pas mal joué au théâtre depuis ma sortie de l’IAD en 2014, ça me manque. En fait, comme j’ai d’abord fait des études de langues avant celles de comédienne à l’IAD, j’ai été cataloguée et on m’a poussée vers l’écriture. Aujourd’hui, ça me pèse qu’on me demande de faire l’un ou l’autre car je n’ai pas envie de choisir.


Recevoir ce prix SACD, cela vous fait quoi ?

Caroline : C’est une reconnaissance, d’autant plus qu’on n’a pas beaucoup d’expérience et qu’on doute parfois de notre légitimité. Recevoir un prix, ça donne confiance. C’est important d’avoir confiance et d’oser.

Martin : Et celui-là a une chouette saveur car il souligne le parcours.

Et alors, les qualités et défauts de l’une et l’autre ?

Caroline : J’ai noté intelligent / sensible car ça se rejoint. On se comprend pour beaucoup de choses. Je crois qu’on a la même forme d’intelligence avec des sensibilités qui se complètent. Son imagination est plus visuelle, la mienne plus dans les dialogues. Et il prend les choses très à cœur : tout a de l’importance, donc tout doit être bien fait. C’est un passionné. De là vient son côté exigeant, avec les autres et avec lui-même. Ça met la barre haut et dans le travail c’est appréciable. Parfois c’est difficile car l’exigence a des côtés positifs et négatifs.

Martin : Ce qui caractérise Caro, c’est sa très grande sensibilité et sa justesse. Elle met sur papier une idée avec une aisance sidérante. Et cette justesse, on la retrouve aussi sur le plateau pour guider les acteurs ou au montage. C’est vrai que sa sensibilité est parfois un défaut car elle craque ou elle pleure souvent. Mais ça montre qu’elle tient au projet.
Autre point crucial : elle est super organisée, et en cela on se ressemble. Avec elle, les choses sont claires, installées, décidées et c’est hyper rassurant. Le pendant, c’est qu’elle est méga perfectionniste, limite control freak. On l’est tous les deux et on y travaille car on ne peut pas être doués en tout. Mais je crois que c’est aussi ce qui fait la force de notre duo, on va jusqu’au bout, dans les détails et même si on a des lacunes, on ne lâche pas.


Pour aller plus loin

. Pour tout savoir sur le palmarès, vous pouvez lire en ligne ou télécharger la publication dédiée.

. Voyez la remise des Prix en vidéo ici...

. ... Et découvrez des photos de la cérémonie et ses coulisses là !

Focus sur Caroline Taillet et Martin Landmeters, Prix SACD Web 2020